Veronica Kamwela transforme l'ignorance en amour dans toute la Tanzanie

Veronica Kamwela est la directrice de programme de Smile Train pour la Tanzanie. À l'occasion de la Journée internationale de la femme, nous avons rencontré cette femme courageuse pour lui expliquer pourquoi ce travail est si personnel pour elle, comment le modèle Smile Train permet déjà de construire un avenir durable pour des soins de classe mondiale pour les fentes dans son pays, un patient qu'elle n'oubliera jamais, et plus encore.

Parlez-moi de votre parcours jusqu'à Smile Train.

Avant de rejoindre Smile Train, je travaillais avec une organisation de jeunesse qui donnait aux jeunes les moyens d'acquérir des aptitudes à la vie quotidienne, une éducation en matière de santé sexuelle et reproductive, une formation professionnelle et éducative, ainsi que des compétences pratiques, et leur fournissait le matériel nécessaire pour créer ou développer leur entreprise. J'ai entendu parler de Smile Train pour la première fois sur un site de recherche d'emploi en ligne. J'étais très intéressée par l'idée de rejoindre l'équipe chargée d'apporter le sourire aux enfants atteints de fentes, car j'ai grandi en voyant quelqu'un avec une fente et, malheureusement, nous croyions que c'était une sorcière.

Qu'est-ce que cela fait de travailler pour Smile Train ? Qu'est-ce qui vous séduit dans ce travail?

Travailler avec Smile Train, c'est comme un rêve qui se réalise. On voit l'impact dans la vie d'une personne immédiatement après l'opération. La transformation est visible. Dans mon travail précédent, l'impact prenait beaucoup de temps et était parfois très difficile à mesurer.

Y a-t-il un patient qui vous a particulièrement inspiré ?

Je n'oublierai jamais Sikujua. Elle est née dans une forêt, et sa mère pensait qu'un verre brisé lui avait coupé la lèvre. Sa mère m'a raconté que l'allaitement de Sikujua était très difficile, alors, en désespoir de cause, elle lui a donné du lait de vache - mais elle continuait à perdre du poids*. Plus tard, la famille a entendu parler de Smile Train et a emmené Sikujua, qui souffrait de malnutrition sévère, à l'hôpital partenaire le plus proche. Ils ont été admis pendant deux semaines, puis renvoyés chez eux afin de mettre en pratique ce qu'ils avaient appris pour s'occuper de Sikujua, mais il était difficile pour eux de retourner se faire soigner car ils n'avaient pas assez d'argent pour payer le bus et avaient perdu la communication avec l'hôpital. Lorsque Sikujua a grandi, ils l'ont cachée à l'intérieur pour que les gens ne la voient pas et ne se moquent pas d'elle. Elle se couvrait le visage avec son bras chaque fois qu'ils avaient de la visite à la maison. À l'âge d'un an et huit mois, elle ne pouvait pas parler, mais elle comprenait quand on lui disait de ramasser quelque chose. Après son opération de la fente labiale, sa mère n'en revenait pas de la transformation du visage de sa fille. Elle a décidé de changer son nom de Sikujua (qui signifie "Je ne savais pas") en Upendo ("Amour"). Upendo attend maintenant d'être opérée d'une fente palatine et de bénéficier d'autres interventions, comme l'orthophonie, dans l'hôpital partenaire.

Vous avez récemment été à l'origine de la création du premier programme ORL pour les fentes auditives en Afrique de l'Est. En quoi cela est-il si important ?

La création du programme ORL était une excellente initiative pour les personnes atteintes de fentes ici, car la majorité d'entre elles ont des problèmes d'audition. Je suis ravie que, grâce à cette intervention, nos patients puissent enfin bénéficier de ce soutien vital.

Quelles sont vos stratégies pour sensibiliser et développer les programmes en Tanzanie ?

Je sensibilise le public par le biais de la radio, de dépliants, de SMS groupés, de marathons et en participant à différentes réunions et ateliers organisés par Smile Train. Mon plan de croissance est d'avoir des partenaires dans toutes les zones de mon pays.

Que peut-on faire de plus pour renforcer nos programmes dans la région ?

Nos programmes seront renforcés lorsque davantage de personnes en auront connaissance. Nous devons également impliquer davantage le gouvernement et veiller à ce que chaque patient, où qu'il soit en Tanzanie, puisse recevoir des soins complets au-delà de la chirurgie, tels qu'un soutien nutritionnel, une orthophonie, des services ORL, une aide psychologique, etc.

En quoi la cause et le modèle de Smile Train sont-ils importants pour vous ?

C'est la durabilité. Grâce à nos années d'investissement dans des équipes spécialisées dans le traitement des fentes dans tout le pays, je pense que nous sommes parvenus à un point où, même sans la présence continue de Smile Train, les enfants atteints de fentes recevront toujours un traitement de haute qualité, car nous disposons désormais d'équipes de personnel médical local (chirurgiens, anesthésistes, nutritionnistes, etc.) spécialement formées pour s'occuper de ces enfants et pour former la prochaine génération aux meilleures techniques.

Pourquoi ce travail sur le traitement des fentes, en particulier, est-il si important?

Ce travail est très important pour moi parce que les croyances que j'avais autrefois sur la personne atteinte d'une fente que j'ai connue quand j'étais jeune sont encore très répandues. Les gens croient encore que les personnes atteintes de fentes sont des sorcières, qu'elles ne sont pas normales et qu'il ne faut donc pas les fréquenter. Le traitement des fentes est très important pour moi, car il signifie que nous aidons ces personnes à vivre comme les autres membres de la communauté.

Quel est votre espoir ultime pour les soins de santé en Afrique?

Les cas de fentes sont en augmentation ici par rapport aux années précédentes. J'espère que les gouvernements et les prestataires de soins de santé commenceront à accorder la priorité aux patients souffrant de fentes et à mettre en œuvre un meilleur plan de traitement, comme la collaboration avec des organisations telles que Smile Train.

*Le lait de vache, même bouilli et refroidi, ne peut PAS remplacer le lait maternel. Il ne s'agit pas d'un avis médical et vous devez toujours consulter votre pédiatre ou un spécialiste certifié en nutrition si votre enfant a des difficultés à téter.