Siriza et Janerose : la longue route cahoteuse vers les soins de la fente

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Siriza and Janerose’s Long, Broken Road to Cleft Treatment

À quelques kilomètres du centre de Harare se trouve une route défoncée. Sous une chaleur de 40 °C, des gens marchent des deux côtés, portant des charges sur le dos et sur la tête, tandis que des enfants courent à leurs côtés ou seuls. La route est si étroite et si encombrée qu’on se dit qu’elle est à sens unique… jusqu’à ce qu’un camion vous fonce dessus de face, suivi d’un autre. On se rabat vite sur le bas‑côté ; les passants ne bronchent pas. On repart, la ville s’éloigne, mais la circulation piétonne ne faiblit pas.

À environ 30 miles (une vingtaine de kilomètres) en descendant cette route se trouve une ruelle non indiquée, qu’on rate si on cligne des yeux, qui mène à un petit village poussiéreux de dizaines de poulets et de quelques huttes aux toits de chaume sans plomberie ni électricité fiable.

An outside view of Siriza’s village
Le village de Siriza

Ce n’est pas un endroit facile pour une personne porteuse de fente, comme Siriza peut en témoigner. Enfant, ses camarades la harcelaient tellement sur son apparence qu’elle dut abandonner l’école.

« Ils ne pouvaient pas comprendre ce que je ressentais », se souvient‑elle, près de trente ans plus tard.

Sa famille a cherché désespérément de l’aide, mais sans moyens de payer, elle passa sa jeunesse à la maison.

Pourtant, grandir entourée d’un cercle d’amour l’a aidée à s’aimer elle‑même. Peu à peu, elle apprit à « vivre avec la fente », comme elle dit.

Quand Siriza a grandi, elle a quitté son village pour aller faire des petits boulots où elle pouvait, surtout chez les gens. C’est là qu’elle a rencontré un homme qui a vu à quel point elle était belle, dedans comme dehors. Il s’appelait March. Il n’avait pas beaucoup de revenus, mais pour Siriza, c’était le compagnon dont elle avait toujours rêvé. Pourtant, quand il lui a demandé sa main, elle a hésité.

Depuis toute petite, elle passait des nuits entières allongée dans le noir, les yeux grands ouverts, terrifiée à l’idée de devenir mère. Comment pouvait‑elle consciemment risquer d’offrir à son enfant une vie comme la sienne ? Mais après une enfance marquée par le rejet et la solitude, elle ne pouvait pas laisser passer la chance d’être avec quelqu’un qui la rendait heureuse.

Rêves d’un avenir

Siriza et March étaient très heureux ensemble, mais la vie restait dure. Aucun des deux ne trouvait de revenu stable dans leur petit village, ils ont donc déménagé à Harare. Leur situation financière n’a guère évolué là‑bas, alors ils sont revenus après quelques années; pourtant, c’est à Harare que Siriza a vécu deux des plus grandes joies de sa vie : la naissance de ses deux premiers enfants, aucun des deux n’ayant une fente.

Puis son troisième enfant, Janerose, est née avec une fente. Au moment où Siriza l’a tenue pour la première fois, elle a cru entendre résonner les moqueries de son enfance, les mêmes noms qu’on lui lançait jadis. Son regard a vacillé entre ce bébé minuscule et fragile blotti contre elle et tous les endroits où on l’avait exclue et rabaissée ; sauf qu’à présent, c’était sa propre fille, et ça faisait dix fois plus mal. Elle s’est sentie tellement coupable — pourquoi avait‑elle cru pouvoir échapper à son destin pour toujours ?

Janerose before cleft surgery
Janerose

Mais la petite héritait aussi de la force de caractère de sa mère : même quand elle perdait sa nourriture en mâchant, ou qu’elle devait répéter pour se faire comprendre, elle ne baissait jamais les bras.

À peine méconnaissable

Quand Janerose avait cinq ans, quelqu’un a donné à March un numéro de téléphone. L’homme lui a expliqué que c’était celui d’un hôpital local qui offre gratuitement des chirurgie de la fente. March était sceptique, mais s’est dit qu’il n’avait rien à perdre. Il a appelé et expliqué que sa fille et sa femme avaient besoin de chirurgie, mais qu’il n’avait pas un centime. La voix au bout du fil était si chaleureuse qu’il pouvait presque entendre le sourire de la femme qui le rassurait : ce n’était vraiment pas un problème.

Siriza and Janerose sitting in the hospital just before their cleft surgeries
Siriza tient Janerose sur ses genoux juste avant la chirurgie

Ils sont partis dès qu’ils le purent, entreprenant ce long voyage sur la piste étroite et fissurée jusqu’à Harare. Siriza tenait à ce que Janerose soit opérée en premier. En trente-deux ans de vie avec une fente, les quelques heures que sa fille a passées au bloc opératoire ont été parmi les plus lourdes à supporter. Personne dans la famille n’avait jamais subi de chirurgie auparavant. Siriza faisait confiance au chirurgien, lui-même issu d’un milieu similaire, mais elle n’a pas pu retenir ses larmes lorsqu’il a emmené sa petite pour la chirurgie : pour la transformer.

« Je craignais de ne jamais la revoir vivante », a avoué Siriza. « L’équipe médicale m’a rassurée en me disant que tout irait bien et m’a invitée à m’asseoir et à me détendre. Mais le temps passait si lentement. »

Siriza
Siriza aujourd’hui

Quand Siriza s’est réveillée et s’est regardée dans le miroir, elle ne s’est presque pas reconnaissé. Elle a immédiatement pris son téléphone pour appeler ses parents et leur dire de venir admirer son nouveau sourire.

Toujours ponctuelle

Contrairement à d’autres organisations de la fente qui font venir des médecins étrangers en missions courtes dans les zones vulnérables, le modèle unique et durable de Smile Train rend des soins de classe mondiale pour la fente accessibles gratuitement 365 jours par an dans plus de 75 pays. Pour des familles comme celle de Siriza et Janerose, cela change tout : elles peuvent recevoir immédiatement des soins d’une équipe locale spécialisée, qui connaît leur langue, leur quotidien et en qui elles peuvent avoir confiance, quoi qu’il arrive.

Oser rêver à nouveau

Aujourd’hui, Janerose est en CE1. Siriza ne redoute plus l’avenir : son sourire est la fierté du village. Elle joue avec sa meilleure amie Pure et tape dans un ballon sans craindre les moqueries. Son élocution reste fragile, mais Smile Train est là pour l’orthophonie.

Janerose playing with a soccer ball
Janerose joue avec ses frères et sœurs

L’an dernier, Smile Train a lancé ses premiers programmes d’orthophonie spécialisés au Zimbabwe. Portés par des professionnels locaux, mais accessibles à distance, ils garantissent un suivi régulier et sur mesure.

Nouvelle vie pour Siriza aussi : jadis timide, elle parle désormais de son parcours en toute liberté, un numéro de Smile Train toujours sur elle pour qui en aurait besoin.

« J’ai recommencé à rêver », confie‑t‑elle. « Un jour, j’aurai ma propre ferme de poulets. »

Siriza and Janerose smiling with March and two of her other children
Siriza et Janerose avec March (à droite) et deux des frères et sœurs de Janerose

« Je suis infiniment reconnaissant envers Smile Train pour ma famille », déclare March. « Ces chirurgies changent des vies : elles donnent une chance à chacun de réaliser ses rêves. »

Today, Janerose looks ahead to a hopeful future, thanks to you
Aujourd’hui, Janerose dessine son avenir avec espoir, grâce à vous

Siriza, regardant sa fille jouer dans le champ parmi les poulets et hochant la tête : « Mon histoire et celle de ma fille se terminent bien. »